Pour avoir connu les extrêmes, chacune avec son lot de frustration (l’inertie irritante de l’entreprise qui piétine, le tsunami permanent de la société en forte croissance), et expérimenter des solutions DIY (Do It Yourself) dans une PME, j’ai compris qu’il fallait CUMULER un certain nombre d’actions.
Reprenons au début…
I. Qu’est-ce que le turn over ? Comment se calcule-t-il ?
Appelé aussi taux de rotation, le turn over désigne le renouvellement des effectifs d’une entreprise et se calcul de la manière suivante :
[ (Nombre de départs* année N + nombre d’arrivée année N) / 2 ]
/ effectifs au 01/01/année N = résultat à x 100 pour en traduire un %.
*Démission, licenciement, rupture conventionnelle, retraite (que vous pouvez choisir de retirer car il s’agit d’un départ sans rapport avec un désaveu de l’entreprise).
Exemple de calcul pour une Société de 50 collaborateurs au 01/01/2021, ayant recensé 7 départs et 8 arrivées au cours de l’année 2021 : ([(Nombre de départs 7 + nombre d’arrivée en 8)/ 2] / effectifs au 01/01/2021 soit 50 ) = 0,15
0,15 x 100 = 15%
Et ensuite ?
Le turn over est considéré comme un indicateur clé du climat social de l’entreprise. Clef, comme révélateur ? mais révélateur de quoi ?
De manière schématique, voici les éléments que vous pouvez avoir à l’esprit :
- un taux (faible) < 5% peut révéler un manque de dynamisme de l’entreprise et être contreproductif.
- un taux (élevé) > 15% peut traduire une mauvaise ambiance de travail, et s’accompagner d’une lente fuite des talents et des compétences.
- entre 5 et 15%, vous avez un taux « standard » révélateur d’un bon climat, d’une dynamique de l’entreprise qui s’enrichit de sang neuf mais s’appuie également sur des collaborateurs fiables et expérimentés qui vont transmettre leur savoir et leur connaissance de l’entreprise.
Cependant, la lecture du taux et surtout son interprétation doivent être entourées de précautions car le taux « moyen », « acceptable », varie en fonction :
- des secteurs d’activités (par exemple, le taux est fréquemment élevé dans les centres d’appels),
- du niveau de qualification des postes recrutés :
– la volatilité du personnel peu qualifié est une réalité !
– une compétence en tension va être « chassée » et aura des opportunités de départ.
– à l’inverse, le taux sera moins élevé au sein des fonctions supports cadre de l’organisation,
- de profil démographique du candidat et son rapport au changement régulier de poste (approche des millennials versus celle des générations précédentes Z, Y…)
- du contexte de l’entreprise (forte croissance, réorganisation, rachat).
II. Les 5 conséquences du turn over
D’aucun pourrait considérer que ces mouvements de population ne sont pas si importants et que c’est la vie d’une entreprise. Pourtant, le turn over n’est pas sans conséquence.
Les lister permet d’en prendre conscience et incite à mettre en place des actions pour le limiter.
1. Le coût d’un nouveau recrutement (le temps du process de recrutement qui sollicite une nouvelle fois les RH et les opérationnels, le cout des jobboards, le temps d’intégration avec une faible productivité du collaborateur au démarrage, les frais lié au départ (indemnités…),
2. La perte de temps pour le manager qui a formé son nouveau collaborateur et va devoir recommencer avec la nouvelle recrue,
3. La perte de compétences si le départ concerne un collaborateur enregistrant une certaine ancienneté et la maitrise de process qui va avec !,
4. Le risque de contagion : que pensent ceux qui restent à l’écoute du discours de ceux qui partent !
5. Le risque de lassitude lié au report de la charge de celui qui part sur les collègues qui restent, le temps que le poste soit pourvu.
III. Les 7 causes du turn over
Pour vous présenter les causes du turn over, je choisis de distinguer deux temps : les mouvements au cours de la période d’essai (I) et les mouvements enregistrés une fois la période d’essai validée (II).
Bien entendu, la frontière entre ces deux temps n’est pas totalement hermétique et la cause d’un départ que je cite en temps 1 pourrait également survenir en temps 2.
I) Les départs pendant la période d’essai
1. Les erreurs de castings
Le candidat recruté est surdimensionné : il fera le tour du poste rapidement et aura à cœur d’évoluer tout aussi rapidement. A défaut d’être en mesure de le projeter, il cherchera à partir. Dans ce cas de figure, vous avez peut-être accepté de le rémunérer au-dessus de ses collègues qui ne vont pas tarder à l’apprendre et surtout à ne pas comprendre. Attention, vous avez créé un précédent et risquez de générer de la frustration. Dans ce cas de figure, le candidat a peut-être accepté une rémunération en dessous de ses prétentions en attendant… de trouver une opportunité à la hauteur de ses attentes !
A l’inverse, si vous recrutez quelqu’un de sous dimensionné pour le poste, vous pouvez vous retrouver face à un collaborateur qui ne parviendra pas à réaliser ses missions et se retrouvera en échec, comme vous finalement !
2. La promesse non tenue
C’est l’histoire du décalage entre le poste présenté à l’entretien d’embauche et le poste réellement vécu par le candidat une fois intégré. Vous avez planté un décor enthousiasmant à l’entretien d’embauche, seulement voilà, le nouveau collaborateur ne s’y retrouve pas.
Il peut s’agir d’un décalage entre les missions annoncées et les missions réellement confiées,… un peu moins intéressantes, un peu moins valorisantes… Il peut aussi s’agir aussi du décalage dans la manière dont le collaborateur s’attendait à occuper le poste et à vivre l’entreprise : un minimum d’autonomie, des responsabilités.
3. Une intégration bâclée
L’arrivée dans une nouvelle entreprise est toujours génératrice d’un peu de stress pour un candidat, assailli de mille questions : est-ce que je vais me plaire ? Ai-je fait le bon choix ? Vais-je être accompagné ?
Dans ce contexte de « rentrée scolaire professionnelle», une arrivée non préparée ne sera pas de nature à le rassurer. Bien au contraire !
Imaginez ! Le poste de travail n’est pas prêt, le manager est en congé ce jour-là. Il aurait pu le faire arriver le lendemain mais il a déjà assez attendu comme cela !
Pour son premier jour, la jeune recrue se retrouve donc catapultée à son poste de travail avec une pile de dossiers à étiqueter « À lire pour commencer à comprendre ».
Pour son premier repas, il se retrouvera seul, dans un service déserté par les collaborateurs partis déjeuner, comme à leur habitude. Le peu de soin apporté à l’intégration du nouveau collaborateur va légitimement l’inviter à réfléchir à celui qui lui sera apporté au cours de la collaboration.
II) Les départs après la période d’essai
1. Une absence de gestion de carrière
Le poids des perspectives d’évolution pèse dans le choix du candidat de rejoindre (ou non) une entreprise. Mais, une fois annoncées à l’entretien d’embauche, encore faut-il leur donner vie et consistance !
A défaut, vous altérerez un élément fondamental de la relation de travail, de la relation humaine finalement : LA CONFIANCE.
A défaut, le collaborateur frustré ira chercher en dehors de l’entreprise ce qu’il ne peut trouver à l’intérieur.
2. Un problème de management
Les managers n’ont pas la vie facile. Souvent sous l’eau opérationnellement parlant, ils ont généralement peu de temps à consacrer au « véritable management » de leurs équipes. Ils sont sur le terrain et orientés résultats concrets. Alors, manager est souvent entendu et appliquer comme « faire en sorte que le travail se fasse ». Quelle que soit la manière et les moyens… et les conséquences !
3. Climat social tendu et conditions de travail défavorables
D’une manière générale, difficile d’avoir envie de se lever le matin pour aller passer 8 heures dans une ambiance délétère, génératrice de stress et sans perspective d’amélioration à court ou moyen terme.
L’issue est l’ailleurs !
Si vous vous préoccupez de la performance de votre entreprise, préoccupez-vous du moral des collaborateurs. Depuis des années, il est question de symétrie des attentions : on ne peut donner que ce que l’on a ! un collaborateur heureux rendra le client heureux ! A contrario… un climat tendu produira l’effet inverse. Contagion émotionnelle !
4. Rémunération inadaptée & absence de progression
L’aspect financier de la relation de travail déclenche traditionnellement son lot de questions : suis-je payé le bon salaire ? À poste et ancienneté similaires, suis-je payé comme mon(ma) collègue ? Vais-je progresser ? Dans quel délai ? Dans quelle proportion ? À quel avantage puis-je prétendre ?
Un mauvais positionnement de salaire dans un marché du travail tendu, une iniquité avérée à l’ère des Egalités, une absence de progression en temps d’inflation.. sont autant d’occasions de semer le doute et de planter la graine de l’idée d’aller voir ailleurs.
IV. Les 5 remèdes au turn over

1. Le DUO process de recrutement / process d’onboarding
Elaborer sa politique de recrutement, c’est : réfléchir à la présentation valorisée et honnête de son entreprise et des postes à pourvoir, c’est maitriser les supports de recrutement et leurs couts, c’est faire collaborer les acteurs du process (RH & opérationnels), c’est imaginer ensemble les étapes de validation des compétences, c’est aligner les discours et uniformiser les pratiques, avec pour objectif de recruter la bonne personne au bon poste.
La faire suivre d’un process d’onboarding, c’est soigner l’accueil des nouveaux entrants, c’est commencer à les fidéliser, c’est transmettre la culture de l’entreprise et faire vivre ses valeurs, c’est créer le lien d’appartenance fidélisant. Ce process est aussi le moyen de se rendre compte, au plus tôt, d’une incompatibilité entre le collaborateur et le poste.
2. Une politique de gestion de carrière pour projeter et fidéliser
Qui est votre collaborateur ? se plait-il toujours à son poste ? quelle année a-t-il réalisée ? A-t-il rencontré des difficultés, comment se projette-t-il dans l’entreprise ? quelle formation souhaiterait-il suivre ? ..
La liste des questions est longue, la liste des réponses l’est tout autant. Point non négligeable, ces réponses sont également des informations précieuses pour l’entreprise. Pour les collecter et les traiter, plusieurs outils à disposition : entretien annuel, entretien professionnel, entretien bilan, entretien de mi-année, comité carrières, plan de développement des compétences.. Certains sont obligatoires, d’autres non, à vous de définir le dispositif adapté à votre entreprise qui vous permettra de gérer vos salariés, en conformité, mais sans usine à gaz !
3. Un encadrement qui répond aux exigences des salariés.
Les attentes des collaborateurs à l’égard du management sont bien réelles et peuvent s’avérer déterminantes dans l’issue d’une relation de travail. Oui, un collaborateur peut quitter son emploi à cause de son N+1 et de son mode de management. Mais qu’est ce que les collaborateurs recherchent ? Les articles prolifèrent mais les idées phares demeurent : donner une vision et du sens, faire preuve d’intelligence émotionnelle et relationnelle pour comprendre ses collaborateurs et maintenir des interactions de qualité, s’adapter et endosser des rôles multiples selon les situations, pratiquer l’écoute et feed back -favoriser la cohésion du groupe, accompagner et développer ses collaborateurs.
Et comme tout cela n’est pas inné, parce que bien souvent, on ne reproduit que ce que l’on a vécu, l’entreprise doit accompagner ses managers dans leur évolution ou leur transformation, en leur en donnant non seulement les moyens (formation, temps) mais aussi et surtout l’AUTORISATION, la fameuse impulsion qui vient d’en haut et sans laquelle tout initiative sera un coup (/coût) d’épée dans l’eau !
4. Qualité de vie et conditions de travail
Un climat social apaisé & épanouissant et pourquoi pas enthousiasmant ! Et si vous commenciez à réfléchir à l’intégration d’une démarche de Qualité de Vie et Conditions de travail (QVCT) dans votre entreprise ? Ce serait l‘occasion : d’explorer les 6 champs de la QVT à l’intérieur desquels vous pouvez trouver de multiples leviers d’actions pour améliorer la qualité de vie dans votre entreprise, d’identifier ce que vous pratiquez déjà et de le valoriser, de vous aligner, lorsque cela est possible sur les attentes de vos collaborateurs évoluant dans un monde du travail qui parle d’équilibre vie privée / vie pro, de télétravail, d’organisation hybride, de flexibilité, etc.
5. Une politique de rémunération équitable et motivante
La rémunération est un facteur indéniable de motivation et la motivation est génératrice de performance. Le collaborateur y voit la traduction de sa valeur et la reconnaissance de ses efforts. Oui, les salariés raisonnent aussi en terme de ROI ! Réfléchir à une politique de rémunération vous permettrait de mettre à plat l’existant et surtout de le challenger pour identifier en toute objectivité ce qui fonctionne et ce qui ne fonctionne pas.
Un peu à l’image d’une recette de cuisine, je considère que ces 5 remèdes sont des ingrédients CUMULATIFS.
Cinq terrains d’actions pour mettre les chances de votre côté et agir sur le Turn Over.
Bien entendu, tout ne peut pas être mené de front mais je vous propose de nous mettre en mode projet et d’avancer, pas à pas, vers l’élaboration d’une politique RH globale structurante qui non seulement répondra à cette problématique spécifique mais aussi, vous consolidera sur bien d’autres sujets mentionnés dans cet article.
Entretenons-nous sur votre situation actuelle !
0 commentaires